L’époque de l’autorisation de jouissance n’est-elle pas aussi celle de l’impératif de jouissance ? Est-ce pour cela que nous apparaît chaque jour un peu plus vraie la découverte par Lacan que le surmoi, même sous sa forme interdictrice, se résume dans la formule : « jouis! »  ? À l’ère de la science et du discours capitaliste qu’il conditionne, la consommation est insatiable et effrénée. Elle peut alors court-circuiter l’économie propre du sujet et substituer son circuit à celui de la pulsion. Il n’y a pas de « sujet moderne » (Jacques-ALain Miller) car le sujet est une fonction du signifiant, un effet, serine Lacan tout au long de son enseignement. Mais cette fonction ne subit-elle pas les effets corrosifs de la consommation sur la parole ? N’y a-t-il pas alors, par contre, des « individus » (Lacan emploie le mot dans les années 70) modernes ? La science ne produit-elle pas de tels individus non divisés, appareillés par des prothèses et aspirés par l’idéal scientiste de surmonter la division inhérente au parlêtre ? Nous aurons l’occasion de nous poser ces questions pour notre dernière Conversation de l’année grâce aux travaux d’Hélène Bonnaud et d’Aurélie Charpentier-Libert qui présenteront toutes deux des cas cliniques.

« L’addiction, limite au sans limites » par Hélène Bonnaud

Un cas clinique ouvrira notre réflexion concernant l’addiction à l’alcool chez un sujet féminin. Il s’agira de débusquer la jouissance en jeu dans son symptôme, jouissance qui s’organise autour du corps et de sa mortalité. Nous essaierons de repérer en quoi son addiction se réfère ou pas à l’époque disciplinaire, terme employé par J.-A. Miller pour qualifier l’époque où l’interdit et le Nom-du Père faisaient limite à la jouissance alors qu’aujourd’hui, la jouissance a pris les formes de l’addiction généralisée. Boire n’a plus alors de sens, ou plus précisément, n’est plus que mode de jouir, dans son itération obstinée.

 « Être joui » par Aurélie Charpentier-Libert

Certains symptômes provoquent des réactions entre déni et refoulement auprès des interlocuteurs des patients. C’est particulièrement le cas lorsque ces symptômes concernent la sexualité chez de jeunes adolescents. En la matière la tentation de l’éducation sexuelle ou même de la légifération, apparait rapidement comme solution prenant appui sur la norme. Le cas présenté nous montrera une jeune fille qui, loin de chercher un  mode d’emploi pour réguler sa jouissance, demande au contraire comment la pousser toujours plus loin.

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