A 47 ans d’une vie qu’il décrit comme une « errance professionnelle » mêlée de « défonce à l’alcool », il a presque tout perdu, et s’estime au bord de la clochardisation. Il ne voit plus ses enfants ou presque. Il peine à continuer son travail car il ne peut réfréner des élans d’insubordination. Et lorsqu’il ne travaille pas il n’a plus aucun désir. Et il se le reproche. Alors il descend et vide une bouteille avec la population de la rue. « C’est comme si j’avais eu des rêves et qu’ils avaient été sabotés ; j’ouvre plus la boîte où ils étaient. » Son rêve ? « Être heureux. » Ce qui s’y oppose ? « Moi. » Il est « désabusé » et voudrait se « donner des coups de pied au cul ». Et il ne peut aider son aîné qui est, dit-il, comme lui et se déscolarise. « La vie, c’est comme être acrobate de cirque sans filet ». Pour faire quelles figures ? « L’amour, la rencontre. » Mais c’est aussi être père ! Alors pourquoi vouloir faire des figures qui lui font peur ?
On le voit, ce n’est pas le vide du désir dont il s’agit mais plutôt l’épuisement dû au commandement insatiable d’un surmoi féroce qui met la barre très haut, à un niveau impossible à atteindre qui le laisse sans possibilité de réussir, écrasé, vidé. Contrairement au topos qui voudrait que l’alcool remplisse un vide, c’est bien toujours, comme ici, un trop plein qu’il s’agit de vider.