Jean-Baptiste Greuze | Jeune fille exprimant l’effroi
Compte-rendu de la Conversation du 20 mars 2017
Coralie Haslé
Nous avons débattu à-partir du texte de Luis Iriarte « Un lien social toxique : considération sur un cas d’addiction sans objet », présenté par Elisabetta Milan en présence de Laure Naveau.
À-partir de l’affirmation JAM que « toute activité peut devenir drogue », Luis Iriarte nous parle d’une patiente qui vient parler de ce qu’elle nomme « ses relations toxiques » avec certains hommes. Cette femme oppose les relations « platoniques », sans violence mais dans lesquelles elle s’ennuie, aux relations « dynamiques » qui deviennent vite toxiques et dans lesquelles elle est maltraitée. La patiente fait rapidement le lien avec son père, un homme charismatique, imposant mais aussi manipulateur et maltraitant, qui l’a même un jour traité de salope. Par ailleurs, particulièrement après les ruptures avec ses partenaires-toxiques, cette femme est envahie par des pensées de type persécutrices. Elle pense que l’ex-partenaire cherche à l’agresser, elle se sent épiée, suivie. Elle porte plainte et porte toujours sur elle les preuves de sa persécution.
Laure Naveau pose la question d’une paranoïa d’auto-punition de type « Aimée ». Nous discutons la structure, en évoquant notamment quelque chose qui ressemble à un appel au père. Nous concluons qu’il peut bien exister un appel au père dans la psychose mais que c’est un appel qui n’arrête pas de se perdre. « Père-version », une version vers le père, une perversion sur un versant masochiste « se faire battre ». Luis Iriarte concluait son texte sur cette place d’objet de l’Autre : « Nous constatons que lorsqu’il n’y a pas un objet qui sépare le sujet de l’Autre, c’est le sujet lui-même qui vient à occuper cette place d’objet ». Les preuves qu’elle porte sur elle, ont un effet de pacification, elles permettent une localisation de l’objet. Alors que l’on avait repéré cette localisation de l’objet regard, Laure Naveau attire l’attention sur l’objet voix. C’est « l’objet dans la poche » de Lacan ! Le « née soumise » évoqué par la patiente serait donc un né « soumise à la voix de l’autre ». L’objet toxique, pour cette femme, a donc avoir avec la parole, la parole qui a marqué le corps : notamment le « salope » prononcé par le père. Il vaut donc probablement mieux que les procédures judiciaires n’avancent pas plus et surtout qu’elle garde ces preuves qui la protègent d’un risque de passage à l’acte. Laure Naveau repère en outre dans une parole de la patiente une piste possible pour orienter la prise en charge : « elle est fragile », dit-elle, et l’autre en « profite pour la persécuter ». Il s’agirait d’isoler le « fragile », de le séparer de la persécution, d’en faire un S1 tout seul, afin qu’elle puisse se faire reconnaitre comme un autre fragile et ainsi désactiver le « salope ». Et qu’à partir de cette fragilité, elle puisse mettre à distance la persécution en appelant de ses vœux la possibilité d’une relation « platonique ».