Plus de tabac, pas d’argent.

On lui propose des patchs à la nicotine.

Refus de l’intéressé : pas question de mettre ça dans mon corps !

L’automédication est au principe des pratiques de ce sujet addicté aux drogues psychoactives. Si le médecin « se prescrit lui-même » selon Balint, beaucoup de sujets sont leurs propres médecins. Le refus du traitement médical est l’effet de l’impossibilité de faire avec le désir de l’autre. C’est la marque d’une autonomie forcenée : noli me tangere* comme dit Jesus, mort et ressuscité, répondant à Marie. L’addicté c’est peut-être un déjà mort pas encore né, intouché dans les limbes.

*Noli me tangere : (« Ne me touche pas » ou « Ne me retiens pas » ) est la traduction latine des paroles prononcées par Jésus ressuscité le dimanche de Pâques à l’adresse de Marie-Madeleine (Marie de Magdala). On trouve cette formule latine sous la plume de saint Jérôme dans la Vulgate, évangile selon saint Jean, chapitre 20, versets 11 à 18 (Vulgate Clementina, traduction : Bible de Jérusalem).

Source : Wikipedia, qui signale aussi l’usage par Michel Foucault dans Surveiller et Punir de l’expression pour symboliser le passage, à l’âge classique, du supplice au châtiment carcéral systématique. On peut peut-être proposer que ce mouvement se prolonge, à l’ère contemporaine, de l’extension de l’hygiénisme et de la médication de l’existence. 

Dans cette perspective, on peut émettre l’hypothèse que l’extension des addictions, avec ou « sans substance », mais aussi du signifiant et du « style addictif » de l’époque (l’expression est de Jacques-Alain Miller) constitue une échappée de l’instrumentation croissante des corps singuliers au profit de l’organisation sociale. À l’utilitarisme qui est la doctrine visant sa suppression, l’inutile comprimé explose et témoigne de la vérité stupide tapie au coeur de l’être parlant : la jouissance, c’est l’inutile. Avis aux politiques de tous bords…